Eloge funèbre du docteur Edouard Branère

Archive privée inédite
  • Date: peut-être 04/04/1914
  • Lieu: Soustons ? (40)

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Soustons, 4 Avril 1914.

Mon émotion est grande en venant, pour la dernière fois saluer, au seuil de cette tombe, le vénéré docteur Branère qui, contraste frappant, me reçut au seuil de la vie, et qui occupa une si grande place dans l'affection de tous les miens.
La sympathique figure de ce grand ami de ma famille se retrouve dans tous mes souvenirs d'enfance : pas une réunion, pas une fête n'avait lieu sans qu'il y fût ; il s'associait à nos joies, à nos tristesses, et nous l'aimions tout naturellement d'une affection aussi sincère qu'admirative, aussi respectueuse que reconnaissante.
Et c'est pourquoi, contenant mon émotion, me croirai-je autorisé à traduire aujourd'hui les sentiments qui m'animaient envers lui, et à dire à quel point je l'ai admiré dans sa vie toute de dévouement et de bonté.
Voilà plus de soixante ans que le docteur Édouard Branère, après de brillantes et sérieuses études à la Faculté de Paris, vint se fixer à Soustons pour y exercer la médecine.
A ce moment la misère était grande dans la région, il n'y avait pas de routes, les Sociétés de Secours Mutuels n'existaient point ; matin et soir, de jour et de nuit, le docteur Branère parcourait à cheval la campagne pour prodiguer ses soins éclairés à ses nombreux malades, et leur apporter, sinon la guérison immédiate, du moins un soulagement certain et le réconfort de sa parole douce et consolante.
S'il fut parfois peu récompensé de ses fatigues et de ses peines, il n'en continua pas moins, cinquante-cinq années durant, sans répit, sans relâche et toujours sans amertume, son pénible labeur quotidien avec un désintéressement sans borne, plus soucieux de remplir un devoir, de soulager une misère, que d'assurer le bien-être de sa famille.
Quel admirable exemple que cette longue vie toute de travail et d'abnégation, et que lui sera-t-il dû, dans l'autre monde, où sont récompensées les vies honnêtes de la terre! N'avait-il pas coutume de répéter dans sa foi confiante : « Vos aumônes, là-haut, vous font une richesse ».....
D'un aspect sympathique, avec ses yeux vifs et intelligents, son langage spirituel, malicieux parfois, mais qui cachait toujours une exquise bonté, brave homme par excellence, le docteur Branère n'avait que des amis : il était universellement considéré et connu pour sa loyauté, sa droiture, la noblesse de son caractère, autant que recherché pour son talent et sa science médicale appréciés bien au loin de notre région.
Je n'essaierai pas d'apporter quelques consolations à la douleur de sa famille ; qu'elle puise un peu de réconfort dans le spectacle émouvant de cette foule si pieusement recueillie devant cette tombe, accourue de tous les coins du canton pour apporter son témoignage de respectueuse sympathie et son tribut de reconnaissance.
Que Madame Branère et ses filles,
Que mon confrère et ami d'enfance, le docteur Paul Branère,
Veuillent bien agréer l'expression de mes condoléances attristées.
Et vous, ami cher et vénéré, vous dont le souvenir restera impérissable pour le bien que vous fîtes, au nom de la population Soustonnaise, au nom de la population Azurienne qui ne vous oublia jamais, au nom de l'Association des Médecins des Landes, en mon nom personnel, recevez notre suprême adieu !

Bayonne. - Imp. Lasserre, 20, rue Gambetta.