Lettre de M. Dareau-Laubadère adressée à M. Dartigaux-Laplante, membre du conseil général et maire, à Castelnau-Rivière-Basse (65)
Archive privée inédite
- Date: 14/05/1840
- Lieu: Pau (64)
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Monsieur
Dartigaux-Laplante
membre du conseil gal, et maire
à Castelnau-Riviere-Basse
par Maubourguet
h. Pyrénees
Je vous transmets avec ma lettre celle d'un malheureux, et qui l'est depuis bien longtemps, puisqu'il est, dit-il, depuis 21 ans, détenu au Bagne de Rochefort. cette éternité de supplice effraye autant qu'elle afflige. vous voyez l'objet de sa lettre. il paroîtroît que sa conduite a été bien notée, et qu'il seroit question de le faire figurer au nombre de ceux qui doivent être proposés à la clémence royale. comme de semblables ne sont accordées qu'aprés de longues et sûres épreuves par des supérieurs qui ne sont pas suspects de foiblesse, nous devons croire que notre infortuné compatriote s'est amendé, et qu'il est sincère dans le repentir dont il se dit pénétré.
dès lors, j'interviens auprés de vous pour vous demander de lui être favorable dans le recours qu'il forme auprés de vous. 21 ans de captivité ! c'est de quoi corriger assurémt, si le moyen corrige; et il faut croire que c'est ainsi qu'il agit sur quelques uns, sinon sur tous. ce certificat qu'il sollicite pour justifier qu'il trouveroit du travail dans son pays, et protection dans les autorités municipales, c'est a vous qu'il le demande par mon intermédiaire. il paroîtroit qu'a cette attestation tiendroit la fin des tourmens de cet homme. ce seroit sous son nom sans doute qu'il faudroit l'adresser, ainsi qu'il l'indique, c'est au moins suivant cette indication que je lui ai adressé ma réponse où je lui dis que je vous transmets sa lettre, en vous demandant d'y avoir égard.
il me rappelle en termes détournés qu'il est mon filleul. j'aurois eu, il faut en convenir, la main malheureuse cette fois la; ce qui est peu propre a recommander mon chrême - quoiqu'il en soit, j'ai un souvenir trés confus de cet individu que je rappelle avoir revu a peine depuis son Baptême qui fut administré par l'archiprêtre St Arnous, et dans lequel la pauvre mad. Garac qui y figura comme marraine, sembloit devoir modifier le vice de ma funeste participation. cela remonte haut, comme vous voyez; 1796 ou 17, a peu prés. il appartiendroit en ce cas, a la famille Lacassaigne dont la maison alors etoit celle qui est derriere Laburthe Lacastelle. je ne connois plus personne de cette famille que celui qui habite maintenant l'ancienne maison de Conchez au Cammas. celui là pourroit fournir quelques renseignemens.
dans ma réponse, je lui dis, qu'au cas où a sa sortie du Bagne, il fut libre de choisir sa résidence, en la désignant d'avance; il feroit bien de faire choix d'un Départemt où éxisteroient de grands chantiers de travaux publics de longue durée, puisqu'il s'assureroit ainsi de moyens de travail qui rendroient sa condition moins précaire; et en effet, là n'éxistent pas des préventions; on y reçoit a travailler tout ce qui en est capable.
voila, mon cher monsieur, l'objet de ma lettre. il m'a semblé qu'une aussi longue infortune, quelque méritée qu'elle ait pû être, peut être envisagée comme suffisamt expiatoire. maintenant, si vous en jugez ainsi, nous devons espérer qu'il ne nous en surviendra pas de regrets. nous aurons satisfait au principe, qu'il ne faut pas vouloir la mort du pêcheur.
je termine en vous priant d'offrir mes hommages a vos dames; et vous recevez, mon cher voisin, l'assurance cordiale de ma parfaite considération
p. s. ma lettre est écrite depuis plusieurs jours. j'avois compté pour vous la faire parvenir sur une occasion qui m'a manqué. je crois que le cas de ce malheureux presse. le travail relatif aux graces doit être avancé.
1840
Pau le 14 mai
Dareau Laubadère
conseiller -
Dartigaux-Laplante
membre du conseil gal, et maire
à Castelnau-Riviere-Basse
par Maubourguet
h. Pyrénees
Pau 14 mai 1840 |
mon cher monsieur Laplante
Je vous transmets avec ma lettre celle d'un malheureux, et qui l'est depuis bien longtemps, puisqu'il est, dit-il, depuis 21 ans, détenu au Bagne de Rochefort. cette éternité de supplice effraye autant qu'elle afflige. vous voyez l'objet de sa lettre. il paroîtroît que sa conduite a été bien notée, et qu'il seroit question de le faire figurer au nombre de ceux qui doivent être proposés à la clémence royale. comme de semblables ne sont accordées qu'aprés de longues et sûres épreuves par des supérieurs qui ne sont pas suspects de foiblesse, nous devons croire que notre infortuné compatriote s'est amendé, et qu'il est sincère dans le repentir dont il se dit pénétré.
dès lors, j'interviens auprés de vous pour vous demander de lui être favorable dans le recours qu'il forme auprés de vous. 21 ans de captivité ! c'est de quoi corriger assurémt, si le moyen corrige; et il faut croire que c'est ainsi qu'il agit sur quelques uns, sinon sur tous. ce certificat qu'il sollicite pour justifier qu'il trouveroit du travail dans son pays, et protection dans les autorités municipales, c'est a vous qu'il le demande par mon intermédiaire. il paroîtroit qu'a cette attestation tiendroit la fin des tourmens de cet homme. ce seroit sous son nom sans doute qu'il faudroit l'adresser, ainsi qu'il l'indique, c'est au moins suivant cette indication que je lui ai adressé ma réponse où je lui dis que je vous transmets sa lettre, en vous demandant d'y avoir égard.
il me rappelle en termes détournés qu'il est mon filleul. j'aurois eu, il faut en convenir, la main malheureuse cette fois la; ce qui est peu propre a recommander mon chrême - quoiqu'il en soit, j'ai un souvenir trés confus de cet individu que je rappelle avoir revu a peine depuis son Baptême qui fut administré par l'archiprêtre St Arnous, et dans lequel la pauvre mad. Garac qui y figura comme marraine, sembloit devoir modifier le vice de ma funeste participation. cela remonte haut, comme vous voyez; 1796 ou 17, a peu prés. il appartiendroit en ce cas, a la famille Lacassaigne dont la maison alors etoit celle qui est derriere Laburthe Lacastelle. je ne connois plus personne de cette famille que celui qui habite maintenant l'ancienne maison de Conchez au Cammas. celui là pourroit fournir quelques renseignemens.
dans ma réponse, je lui dis, qu'au cas où a sa sortie du Bagne, il fut libre de choisir sa résidence, en la désignant d'avance; il feroit bien de faire choix d'un Départemt où éxisteroient de grands chantiers de travaux publics de longue durée, puisqu'il s'assureroit ainsi de moyens de travail qui rendroient sa condition moins précaire; et en effet, là n'éxistent pas des préventions; on y reçoit a travailler tout ce qui en est capable.
voila, mon cher monsieur, l'objet de ma lettre. il m'a semblé qu'une aussi longue infortune, quelque méritée qu'elle ait pû être, peut être envisagée comme suffisamt expiatoire. maintenant, si vous en jugez ainsi, nous devons espérer qu'il ne nous en surviendra pas de regrets. nous aurons satisfait au principe, qu'il ne faut pas vouloir la mort du pêcheur.
je termine en vous priant d'offrir mes hommages a vos dames; et vous recevez, mon cher voisin, l'assurance cordiale de ma parfaite considération
votre affectionné et dévoué serviteur Dareau-Laubadère |
p. s. ma lettre est écrite depuis plusieurs jours. j'avois compté pour vous la faire parvenir sur une occasion qui m'a manqué. je crois que le cas de ce malheureux presse. le travail relatif aux graces doit être avancé.
1840
Pau le 14 mai
Dareau Laubadère
conseiller -